Humeurs

Expatriée ou immigrée : qui suis-je au Canada?

En arrivant au Canada, je me sentais simplement comme une française parachutée très loin de ses repères. J’ai eu la chance de choisir de changer de pays, je n’ai pas été forcée pour X ou Y raisons. J’ai choisi de me dépayser, de quitter mon pays et l’Europe. Progressivement, j’ai donc commencé à adopter le terme d’Expatriée : je suis Française, installée à l’extérieur de mon pays d’origine.

Au tout début, je trouvais tout absolument génial. C’était beau, c’était différent, c’était exactement ce que je rêvais de vivre en partant si loin, malgré les difficultés qui m’attendaient. Et puis, on ne va pas se mentir : être « expat' », c’est sympa comme terme non? Il y a la notion de voyageur et d’aventure…

Puis rapidement, il faut changer d’angle. On cherche à trouver un travail, on n’a plus rien « d’expat » ici, on devient : immigrant, ou nouvel arrivant.

Immigrée ou expatriée?

Les deux mon Capitain! Je me sens comme expatriée, dans le sens où je suis toujours française. Je suis toujours installée loin (très loin) du pays qui m’a vue grandir. Je suis loin des repères qui étaient les miens, des marqueurs sociaux et des normes que j’ai connues toute ma vie.

Et en même temps, je clame aussi que je suis immigrée. J’ai un accent quand je parle -en français comme en anglais-, parfois je dois demande aux gens de répéter, je ne ris pas à certaines blagues, parce que je ne les comprends pas et qu’il me manque des bagages culturels.

En fait, je dirai que depuis un an (depuis la fin de mon PVT), je me sens un peu comme dans un décalage fréquent : quand je suis ici, je me sens très « immigrée », avec mes habitudes de française, mon humour européen, mon étonnement face à des situations communes. Et à l’inverse, je me surprends à changer mon raisonnement. Dans une situation vraiment mauvaise, je vais chercher du positif. Dans ma ponctuation, je vais machinalement supprimer les espaces avec les points d’interrogation et d’exclamation (désolée pour ça!). Et parfois, mon intonation change, mais ça, je sais que ça ne restera pas : j’ai tendance à absorber ce que j’entends et à le reproduire. Donc si on repart vivre à Paris, je réapprendrai à dire des insultes (bisous les parisiens, on plaisante :’)).

Et quand je rentre en France, je me sens tellement en décalage : j’ai du mal à supporter qu’on râle beaucoup sans de vraies raisons, j’ai du mal à absorber la négativité et la tension de la Capitale, j’ai du mal à me rendre compte que la vie là-bas à continué, sans vraiment beaucoup changer, et en même temps si, et surtout sans que j’y sois (la réflexion la plus égoïste du monde, mais tant pis, je la livre ici comme je la pense parfois).

Fort Langley, la ville qui semble tout droit sortie d’un film. Env. 1h de Vancouver.

Et pour l’avenir?

Si vous me connaissez ou me rencontrez, vous pourrez lire la gêne sur mon visage. L’avenir? Je ne sais pas. Je me sens et Canadienne et Française. Ni Canadienne ni Française. Je ne sais plus trop, je crois que je me forge quelque chose de mixte entre les deux. Peut-être justement une identité mi-expat mi-immigrée? Un Expa-griée? :)

En partant au Canada, je me disais « je pars juste pour mes 2 ans de PVT ». Et en même temps, à peine arrivée, je me disais « je veux rester ». Puis j’ai changé d’avis mille fois, j’ai été perdue tout autant, je vous l’ai partagé souvent sur Instagram. C’est dur de trouver une place et de se dire « oui c’est sûr je vais rester là », surtout quand l’endroit est à minimum 10h de vol, 9h de décalage horaire, et que le prix des loyers (ne parlons pas de l’achat) est absolument aberrant.

En même temps, je ne me sens pas de rentrer, pas tout de suite, pas comme ça.

Donc je crois qu’il ne me reste qu’à suivre cette petite conviction intérieure, celle-là même qui me guide depuis le début. Si je ne sais pas ce que je ferai, peut-être qu’elle le sait, elle?

6 Commentaires

  • Naudon
    27/06/2021 at 09:43

    J’adore ton article. Je me retrouve surtout dans la dernière partie. Les doutes, les questionnements, l’avenir .. des fois je me dis je veux pas faire la RP mais après je panique et me dit mais je ne veux pas rentrer en France alors que faire! C’est si déroutant !

    (L’histoire des espaces avec la ponctuation me traumatise, je fais des mixtes 😅)

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    • Élodie
      29/06/2021 at 08:54

      Ahahaha, bienvenue dans les mixtes de ponctuation 😀
      Oui c’est ça, j’étais beaucoup dans cette phase avant de lancer la RP, je changeais d’avis très régulièrement et j’avais du mal à me projeter. Honnêtement, quand on a déposé le dossier, le lendemain je me disais « non mais je veux partir en fait ».
      Et finalement, maintenant qu’on a la RP, ça va beaucoup mieux… C’est comme si c’était un cap psychologique à franchir en plus de l’administratif on dirait… J’espère que ce sera moins mouvementé pour toi 🙂

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  • Castets Arthur
    29/06/2021 at 10:30

    Hello Elodie, un petit mot pour te dire que je viens de lire ton article, et que j’aime beaucoup comme d’habitude ce que tu écris ! Je me retrouve beaucoup dans ton témoignage, même si je ne suis pas resté au Canada aussi longtemps que toi mais j’ai eu cette sensation là chaque fois que je suis parti vivre à l’étranger et même parfois je ne me sens pas plus dans mon pays lorsque je rentre en France (😂😂😂). Enfin voilà juste pour te dire que tu fais partie de mes lectures hebdomadaires et que c’est toujours un plaisir d’échanger avec toi et de regarder tes stories ! A bientôt. ☺️

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    • Élodie
      01/07/2021 at 15:46

      Hello Arthur! Merci beaucoup pour ton message tellement gentil, il me va droit au coeur!
      J’avouerai que la sensation quand on rentre en France me fait un peu peur aussi ahah! Je ne sais pas du tout comment je réagirai…
      Bon courage en tout cas, j’espère que tes projets futurs par ici pourront se faire 🙂

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  • Estelle
    03/07/2021 at 13:50

    Hello, Je me retrouve tellement dans tes propos ! Ça fait 3 ans que je vis à Toronto et je ressens tellement les mêmes changements que toi. En revanche, je me sens 100% française (et fière de l’être !). Je ne pense pas que je me sentirai Canadienne même après tant de temps au Canada 😉 Mais je trouve que c’est une tellement bénéfique d’être expatrié et que ça nous fait progresser et prendre énormément de recul sur la vie !

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    • Élodie
      03/07/2021 at 16:55

      Hello, merci beaucoup pour ton retour, c’est enrichissant pour moi d’avoir d’autres points de vue sur ce sujet 🙂
      Je comprends totalement, et je te rejoins sur le fait qu’on apprend énormément grâce à cette expérience. Ça permet de relativiser sur beaucoup de choses et même (je trouve) de voir nos habitudes et notre pays complètement différemment 🙂

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